Sophie Langlois: rencontre avec une femme remarquable
Sur la photo, de gauche à droite: Sophie, Marie-Michèle et Valérie
par Marie-Michèle Lapointe-Cloutier
Membre du Studio
AVERTISSEMENT: JE SUIS UNE « FAN FINIE » DE SOPHIE! DONC, ZÉRO RIGUEUR JOURNALISTIQUE ICI. QUE DE L’AMOUR!
Je suis membre du Studio depuis le 26 janvier 2017 très exactement. Le jour de mes 49 ans! J’ai rencontré Sophie quelques mois plus tard. J’ai tout de suite été impressionnée par sa force et sa forme physique.
Sophie est d’une candeur désarmante, vous allez voir. Son témoignage m’a touchée droit au cœur, j’espère qu’il en sera de même pour vous. Bonne lecture!
J’ai eu envie de vous présenter Sophie Langlois, une athlète hors du commun en route vers sa première compétition de powerlifting (dynamophilie). Je souhaitais partager avec vous toute l’admiration que j’éprouve pour cette jeune femme qui ne se laisse pas définir par sa maladie et les limites qu’elle lui impose (Sophie est atteinte de la fibrose kystique et a été greffée des poumons à l’âge de 18 ans).
Sophie est une force de la nature. Une battante. Et ce poids plume joue désormais dans la cour des grands. Toute une réalisation pour cette femme de 35 ans qui admire les « hommes forts » depuis toujours. De la trempe des Louis Cyr, elle n’a pas peur du travail et de l’effort. Comme le dit Valérie, son entraîneuse, Sophie est enthousiaste, rigoureuse et persévérante. Des atouts importants quand on se prépare à une compétition. « Mon rôle est de planifier son entraînement pour qu’elle soit au sommet de sa forme et de sa force lors de la compétition, explique Valérie. Le gros du travail, c’est Sophie qui le fait pendant ses entraînements. »
Ce n’est pas parce qu’on part de loin qu’on ne peut pas aller loin!
Marie-Michèle (MM pour la suite): Depuis quand t’entraînes-tu régulièrement?
Sophie (SO pour la suite): J’ai commencé en 2015, dans un autre gym, avec mon ancien entraîneur Yovann, qui s’entraîne d’ailleurs chez Locomotion! Je m’étais fait un petit plan « poche » : j’allais me faire faire un programme et le suivre pendant un an! Quand j’ai vu mon médecin, il a osé me dire que ça n’allait pas marcher! Il m’a conseillée de prendre un entraîneur pour rester motivée. C’est ce que j’ai fait, à raison d’une fois par mois au début. Après un certain temps je suis passée à deux fois par mois, puis à une fois par semaine. Maintenant, je vois Valérie deux fois par semaine.
MM: Deux fois par semaine! C’est quand même une grosse dépense.
SO: Je n’ai jamais vu le gym comme une dépense, mais comme un investissement. Quand je suis arrivée chez Locomotion, je savais que ça allait me coûter plus cher, mais j’avais besoin d’un entraîneur capable de m’amener où je voulais aller. Parce que je voulais faire du powerlifting.
Je m’étais informée sur Locomotion un an avant de m’y inscrire. J’avais visité les installations. J’avais besoin d’un plan B, car Yovann envisageait de quitter le métier d’entraîneur. Quand c’est arrivé, je suis tout de suite allée m’inscrire chez Locomotion! J’ai été très chanceuse, car Valérie avait de la place pour moi. Je dois avoir un bon karma!
J’aime beaucoup m’entraîner chez Locomotion, même si au début j’avais le sentiment d’être un imposteur! À ma première visite, on m’a dit que je devais voir l’entraîneur-chef. Ça me stressait terriblement. Dans ma tête, j’allais passer une entrevue et on allait me dire que je n’étais pas assez forte. J’étais sûre qu’ils ne me prendraient pas! J’avais l’impression que c’était un club sélect! Quand j’ai rencontré Nicolas, il m’a dit qu’il me verrait bien avec Valérie. J’étais super contente: j’avais passé le
auditions! J’étais prise! (rires)
MM: Qu’est-ce qui t’attirait dans le powerlifting?
SO: J’ai toujours aimé les compétitions d’hommes forts. Quand j’étais petite, je les regardais à la télé. J’aimais ça voir des gens soulever des autos. (rires) Je trouvais ça impressionnant. J’avais l’impression qu’ils étaient tellement forts qu’ils auraient pu soulever la terre. À mon premier gym, quand on m’a demandé de définir mon objectif d’entraînement, j’ai répondu que je voulais être forte. Je partais vraiment de loin, alors c’était un gros objectif! Mon entraîneur m’a dit: « Tu veux être forte. Go, on y
va! »
On s’est donc mis au travail, malgré la fibrose kystique, malgré la transplantation. Il fallait quand même tenir compte de mes limites et des risques pour mes os, mes articulations et mes tendons étant fragilisés par certains médicaments. J’ai commencé doucement à faire des squats avec un petit kettlebell de 10 livres dans les mains. J’en faisais 10, et je me disais que je ne pourrais jamais en faire plus que ça!
MM: Et là, tu « squattes » à combien?
SO: Mon maximum était de 175 livres en décembre dernier. Alors c’est sûrement un peu plus maintenant. C’est sûr que mon but, c’est de faire plus en compétition. On verra! On travaille fort là-dessus. On est en mission! (rires)
La compétition : un rendez-vous avec soi-même
MM: C’est quoi ta compétition?
SO: C’est une compétition régionale de qualification, mais je ne crois pas me qualifier. Je ne suis pas encore rendue là. J’y vais pour me mesurer à moi-même et pour voir comment je prends la pression. Pour apprendre à garder mon focus sans penser aux gens qui me regardent. Je vais pouvoir évaluer ma capacité à gérer le stress, surtout que Valérie m’a fait réaliser que je n’avais jamais fait de spectacles solos quand j’étais petite. (rires) Je veux voir de quoi je suis capable. Je veux aussi voir si j’aime assez la
compétition pour continuer à m’imposer tout le travail et le stress que ça implique. Si oui, je ferai d’autres compétitions, c’est sûr!
Elle aura lieu à Montréal, le 12 mai prochain. Il y aura 60 participants. Je ferai partie de la catégorie des moins de 52 kg. C’est super parce que Yovann et Valérie y participeront aussi. Je vais donc faire ma première compétition avec mes deux entraîneurs! Ça sera une affaire de famille! Surtout que Valérie m’a offert d’être ma coach de compétition et de gérer le côté pratico-pratique de l’affaire.
J’ai lu tous les règlements de la compétition. Il y a beaucoup de règles, même au niveau vestimentaire, c’est un peu intimidant. Mais comme dit Valérie : « Si tu penses que tu n’es pas prête pour faire de la compétition, tu n’en feras jamais. Tu ne seras jamais assez forte à ton goût si tu penses comme ça ».
Ça ne change pas le monde, sauf que…
MM: Quel est ton régime d’entraînement?
SO: Squat, bench, deadlift! (rires) Sérieusement, je m’entraîne quatre jours par semaine: deux jours avec Valérie et deux jours seule. J’ai un programme sur quatre jours et je m’entraîne environ 1 h 30 par séance. En ce moment, mes journées de squat et de deadlift sont plus exigeantes physiquement que mes journées de bench.
Mais quand je fais du bench, j’ai toujours peur de mourir sous la barre. (rires) J’ai une broche qui dépasse sur le sternum à cause de ma transplantation. J’ai dû travailler fort pour surmonter cette peur. Je ne laissais personne s’approcher de ma broche sternale, encore moins y toucher... Quand Yovann m’a dit qu’on allait bencher, j’ai refusé. Mais il a été super patient. Maintenant, je connais ma force et je sais comment mon corps réagit. Alors, je sais si j’ai encore de la force pour une dernière répétition. J’ai
encore une petite crainte à cet égard, mais je vis beaucoup mieux avec ma broche maintenant. Le bench m’a permis de l’apprivoiser, étrangement.
MM: Wow. Je suis encore plus impressionnée! Tu es vraiment courageuse.
SO: J’aime m’entraîner. Je sais ce que je veux et je prends ma démarche au sérieux. Tous les sports ont des risques de blessures, je fais donc attention. Je ne veux pas m’hypothéquer juste pour dire que j’ai benché tel poids. J’ai réalisé récemment que l’important, c’est de faire confiance au processus. Je fais confiance à Valérie. C’est elle qui gère. Moi, j’écoute ce qu’elle me dit, je fais mes charges, je note mes
affaires, je m’entraîne quatre fois semaine. Chacun son rôle! Mon rôle, c’est de m’exécuter et de faire du mieux que je peux, de persévérer. Valérie est là pour me coacher, c’est son travail et j’ai confiance en elle!
MM: Qu’est-ce que ça t’apporte le powerlifting? Quel plaisir y retrouves-tu?
SO: Même si mes charges ne sont pas si lourdes, quand je fais mon deadlift, j’ai l’impression de soulever la terre. Et quand je dépose la barre, j’ai un sentiment d’accomplissement. C’est mon mouvement préféré des trois. J’ai vraiment une impression de puissance en soulevant une charge du sol. Concentrer toute mon énergie à un mouvement, et tout donner en une seule répétition, m’apporte une grande paix.
Ce que j’aime aussi en powerlifting, c’est le fait que ce soit mesurable, tangible et concret. Ça nourrit ma compétitrice interne!
Quand j’ai décidé que je voulais être forte, ma plus grande peur était de devenir trop musclée, de ressembler à un gars. C’était ma hantise. Cette crainte-là m’a empêchée d’aller vers le powerlifting au début. Maintenant, j’ai des trapèzes et je les aime! Ils sont beaux! J’aime mes bras. J’aime entraîner mes bras et mes épaules. J’ai découvert que j’avais beaucoup de préjugés sur l’entraînement, mais mes préjugés sont tombés. J’ai compris qu’on pouvait être musclée et féminine en même temps.
Quand je me décris, je dis: « Sophie, 35 ans, fibrose kystique, greffée depuis 17 ans et forte ». Maintenant, j’ajoute forte à la fin. L’entraînement me procure beaucoup de fierté!
De l’importance d’avoir un entraîneur
MM: Quel est le rôle de Valérie dans ta préparation en vue de la compétition?
SO: En plus de mes programmes d’entraînement, Valérie a commencé à me préparer aux termes et aux règles de compétitions. Entre autres pour le bench, car il y a trois temps d’arrêt pendant les compétitions. C’est très important d’attendre le signal du juge et d’aller à la bonne vitesse, sinon on est disqualifié.
Il me manque encore autour de 40 livres pour atteindre un standard provincial, mais Valérie est confiante. Et ça, c’est super. Parce qu’elle m’aide à repousser mes limites. Mon rêve, c’est de faire deux plates au deadlift. Ça voudrait dire 225 livres, soit un peu plus de deux fois mon poids. C’est mon objectif!
Quand j’ai commencé, je n’avais aucune idée de ce dont j’étais capable. Je ne connaissais pas ma force. J’apprends tranquillement à bien l’évaluer, et Valérie m’aide à y parvenir. Elle est formidable! Elle est forte, drôle et inspirante. Je ne changerais pas d’entraîneuse! Elle comprend mes peurs et elle a une bonne écoute. Elle m’aide à me faire confiance. À m’écouter sans trop m’écouter. J’ai pris conscience – à mon échelle, grâce au gym et mon entraîneuse – tout le travail qu’il y a derrière un sport. Et j’adore mon sport!
L’ABC du powerlifting de compétition
A. 3 mouvements : squat, bench press et deadlift
B. 3 essais pour chaque mouvement
C. Cumul de la plus grosse charge de chacun des mouvements
D. Détermination du gagnant par catégorie d’âge et de poids